Petite escarmouche | Avec Anairë

PETITE ESCARMOUCHE.
PV → Rowena.

Allongé sur le côté, tes grandes ailes soigneusement repliées et plaquées sur ton corps, tu observais le ciel. Ce dernier loin d'être couvert laissait apparaître un soleil d'une taille importante, d'une couleur jaunâtre et lumineux comme il est rare de le voir. Seul quelques ridicules nuages, semblables à des boules éparses de cotons, venaient troubler la clarté que renvoyait cet astre imposant. Comme beaucoup avant toi, en l'observant ainsi, l'idée folle de vouloir l'approcher, le frôler, le toucher, s'insurgea de force dans ton esprit. Aventureux et imaginatif, tu laissas cette pensée germer dans ta tête un moment, alors que tes yeux étaient incapables de se décrocher de l'astre du jour. La couverture sur laquelle il était étendu de tout son long portait de sublime nuances azurées, un bleu spécifique au ciel des beaux jours, un bleu que tous savent reconnaître. Tes songeries ne durèrent qu'un temps, jusqu'à ce qu'une ombre s'insinue entre le soleil et toi. La chaleur qu'il procurait cessa d'arriver jusqu'à tes écailles et tu sentis un profond grognement monter de ta gorge. Sans en savoir plus sur le sujet, tu lanças un grognement sourd d'avertissement. Qui que soit ce nuisible, il avait tout intérêt à vite disparaître. À peine le grognement émit de ta gorge que la forme bougea et disparue au loin. Étonné, tu ne pus que rester bouche bée alors que le soleil revenait avec ses doux rayons, chauffé ta cuirasse.  

Bientôt, tu sentis tes membres s'engourdirent alors que le sommeil gagnait un peu plus de place dans ton esprit à chaque seconde qui passait. Tu tentas de le vaincre à la seule force de ta conviction, mais en restant ainsi couché et même en pensant à rester éveillé, la fatigue gagnait du terrain et menaçait de te faire sombrer dans un sommeil implacable. Bien que l'invitation de la fatigue te plaisait énormément, tu ne pouvais te permettre un tel moment d'égarement. Non. Pas tant que le soleil était encore levé et pas tant qu'il y avait encore à faire. Un bâillement fit vibrer ta mâchoire et tu décidas de te lever pour de bon, décidé à ne pas t'endormir tout de suite. Tu t'étiras brièvement, tirant sur chacune de tes pattes et laissant tes ailes jouées à un drôle de jeu en se pliant et en se dépliant au gré de leurs envies. À présent sur tes quatre pattes dans un coin de l'arène, tu tendis ton cou au maximum, achevant de te préparer à la suite des événements. Alors que tu n'avais pas idée de ce que tu allais bien pouvoir faire et/ou rencontrer, tu t'approchas en marchant puis en trottant du bord de l'arène, décidant de facilité ainsi ton envol. Lorsque tes pattes quittèrent le sol et que tes ailes prirent le relais, tu ressentis l'étrange appel de l'aventure. Ce dernier t'appelait par ton nom et faisait partie intégrante de ton être, cette envie d'aller toujours plus loin, toujours plus haut, toujours plus aux limites. Tu lui laissas te souffler la destination de ta petite excursion et elle te répondit en te conduisant par le biais des brises du vent et des ailes en direction des terres frontalières, là où l'on pouvait trouver les sois-disant vestiges des tous premiers dragons : les statues de Gaïa et d'Ouranos.

« Tiens, quelle surprise. J'espère que tu ne voulais pas être discrète, car c'est raté. Tu fais autant de bruit qu'un troupeau d'ohio quand ceux-ci détalent. »

Dans tes arrières pensées alors que tu naviguais sans encombre, tu te heurtas à la dureté de ces paroles. T'étaient-elles destiné ? Et qui s'adressait à toi de la sorte ? Ton regard finit par fouiller consciencieusement les lieux, une petite forme brune aux reflets bleutées s'élevait dans les airs, mine de rien. Ton regard passa de l'incompréhension à l'étonnement pour finir par devenir des plus méprisants. Plus la forme se rapprochait et plus elle te paraissait réellement petite. Soudain, tu fus frappé par la certitude. Cette dragonne s'adressait donc bien à toi. Elle se trompait sur deux points. Premièrement, tu n'étais pas une femelle comme elle semblait le croire et deuxièmement, tu ne faisais pas temps de bruit que cela. Et puis à la rigueur, qu'importe ? Tu n'étais ni en chasse, ni en train d'espionner qui que ce soit alors pourquoi tenter le diable ? Une fois à ta hauteur, la dragonne te dévisagea et tu pus lire de la moquerie dans ses yeux railleurs. Lorsque tu pus apercevoir de plus prêt ses écailles, tu te rendis compte que leur couleur sombre et profondément répugnante était caractéristique des Kivuli. L'aventure voulait donc qu'en ce lieu, un combat éclate ? Il devait y en avoir déjà eu temps. Dans un profond soupir et lançant un regard des plus méprisants à la ridicule dragonne, tu objectas.

« Navré de ne pas vous convenir dragonne. Que me vaut l'honneur de vous voir en un pareil lieu ? Pourrais-je au moins connaître votre nom et votre statut au sein des Kivuli où serais-ce une trop grande faveur à vous demandez ? Remarquez, à en juger par votre allure pittoresque, vous ne devez avoir aucun rôle important. »

Elle soupira, et me lança un regard méprisant, que ne fis qu'élargir mon sourire moqueur:

« Navré de ne pas vous convenir dragonne. Que me vaut l'honneur de vous voir en un pareil lieu ? Pourrais-je au moins connaître votre nom et votre statut au sein des Kivuli où serais-ce une trop grande faveur à vous demandez ? Remarquez, à en juger par votre allure pittoresque, vous ne devez avoir aucun rôle important. »

La gravité de sa voix me fit comprendre que ce n'était non pas une femelle, mais bel et bien un mâle. Je ricanais. D'une voix hautaine, il esssayait de se trouver quelques alternatives pour me rabaisser. Il pouvait parler. Etait-il frère d'un chef lui? Non, un pitoyable sethemba qui se promenait par ici, et qui ne savait parler normalement. Non. Il fallait se donner un genre, évidemment. Il fallait qu'il prouve sa supériorité, et donc parler de ce ton supérieur. J'en pleurerais presque tellement je trouvais cela... pathétique. Non. En réalité cela convenait parfaitement. N'était-il pas qu'un sethemba après tout? On ne peut pas attendre grand chose de ces dragons de toutes manières alors... Je répliquais, d'une voix ironique sur mon ton toujours moqueur:

"Oh, je vois, on essaye de bien parler? Evidemment, tu trouves que tu parles mieux que moi. Ahah, bien sûr bien sûr. Il faut bien que vous vous trouviez un petit plus. C'est pitoyable m'enfin, c'est digne d'un pauvre Sethemba en même temps... Je crois que mon rang importe peu, sachant que je suis dans les plus proches contacts du chef et que je peux accéder à chacunes de mes demandes. Evidemment, Monsieur a mieux que cela n'est-ce-pas? Je me nomme Rowena, soeur d'Oranaï chef des kivulis. Et toi, les personnes qui ont le privilège de faire la conversation avec toi t'apostrophe par quel nom?"

Je toisais mon nouvel adversaire, ravie d'avoir quelqu'un avec qui converser... ou plutôt déverser mon besoin de railleries de la journée. Un ennemi de plus ou de moins, quelle différence cela faisait. J'étais d'humeur joueuse aujourd'hui. Mes grandes ailes me maintenaient en vol sur place, battants à rythme régulier. Je m'amusais ensuite à lui tourner autour pour le narguer, attentive à chacun de ses mouvements, sans cesser de le dévisager. Prête à esquiver puis contre-attaquer s'il tenter une attaque surprise. Je secouais ma tête et mon cou, faisant onduler ma crête flexible, scintillante sous les rayons du soleil. Je déposais sur lui un regard mi-faussement-doux, mi-narquois. J'étais tout à fait satisfaite d'avoir trouvé divertissement. Et ce dragon-là promettait des échanges tumultueux...